Alors que le monde observe avec inquiétude les tensions autour du programme nucléaire iranien, un autre type de mission, plus discrète mais non moins essentielle, se prépare en coulisses. Cette mission, portée par le VaadHarabanim, consiste à envoyer des émissaires sur les tombes de Morde’haï et Esther, en plein cœur de l’Iran, pour y prier en faveur des donateurs et des nécessiteux. Interview exclusive avec Eliahou (nom d’emprunt), l’un des courageux érudits iraniens qui se rend sur place chaque année.
Question : Eliahou, depuis quinze ans, des émissaires du VaadHarabanim entreprennent un périple exceptionnel pour se rendre à Hamadan et prier sur les tombes de Morde’haï et Esther. Vous êtes l’un d’eux. Pouvez-vous nous en dire plus sur cette mission si particulière ?
Eliahou : Cela fait plusieurs années que le VaadHarabanim a pris cette initiative extraordinaire. Tout a commencé avec la volonté d’intensifier les prières du jeûne d’Esther. Les Rabbanim ont pensé à la force immense que représente le fait de prier sur la tombe même de Morde’haï et d’Esther, en Iran, suivant en cela la Segoula du KavHayachar. Ils ont dû trouver un moyen discret de contacter ceux qui, comme moi, vivent ici et peuvent prier en leur nom. Ainsi, chaque année, des centaines de noms sont transmis par le Vaadet nous les mentionnons dans nos supplications.
Question: Alors, parlez-nous de laSegoula particulière, celle du KavHaYachar. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Eliahou : Le KavYachar enseigne que la récitation du Psaume 22, en particulier sur la tombe d’Esther, a une puissance exceptionnelle pour ouvrir les portes du Ciel. Ce psaume est attribué à Esther elle-même, et il porte en lui toute la détresse et l’espoir d’un peuple au bord du désastre. Nous prions pour la guérison des malades, pour ceux qui cherchent une délivrance dans leur vie, et pour la protection de tout le peuple juif. C’est un moment de ferveur unique.
Question: Comment vivez-vous ces moments d’une intensité rare ?
Eliahou : C’est une mission qui me bouleverse chaque fois que je l’accomplis. Aller prier sur ces tombes, c’est me tenir au carrefour de l’histoire, entre le passé et l’avenir de notre peuple. Je ressens une immense responsabilité lorsque je prononce les noms des personnes qui nous ont confié leurs prières. Hamadan n’est pas une ville anodine, c’est l’ancienne Chouchan mentionnée dans la Meguila et c’est ici que Morde’haï et Esther ont changé le destin du peuple juif.Mais cette mission est aussi dangereuse. Nous devons agir avec une discrétion absolue. Il y a des risques réels à s’y rendre, surtout en tant que Juif pieux vivant en Iran. Mais je ne peux pas renoncer à ce devoir. Tant que je pourrai, je continuerai à prier là-bas.
Question: Quels sont les défis logistiques et de sécurité auxquels vous êtes confronté ?
Eliahou :Cette mission exige des mois de préparation car nous devons contourner de nombreux obstacles, notamment diplomatiques. Les contacts sont établis via un pays tiers, car il n’y a aucune relation officielle entre Israël et l’Iran. Ensuite, nous planifions nos déplacements et nous devons faire attention à ne pas attirer l’attention. Une fois à l’intérieur, je me recueille et commence à prier. Chaque minute compte.
Question: Comment se déroule la cérémonie sur place ?
Eliahou : L’atmosphère est pleine d’histoire et de sainteté. Quand j’arrive, je ferme les yeux et je me représente Esther priant pour son peuple, dans la même détresse que nous ressentons aujourd’hui. Je commence par les Tehilim, en particulier le Psaume 22. Nous récitons, avec les autres émissaires,les Séli’hot, en évoquant les treize attributs de miséricorde. Ce moment est bouleversant. Être là, dans ce lieu à cet instant est particulièrement inspirant. Nous mentionnons ensuite, chaque nom, un par un. Certains d’entre eux me restent gravés dans le cœur, car je sais qu’ils viennent de personnes dans une immense souffrance. Parfois, je ne peux retenir mes larmes.
Question: Que représente cette initiative pour la communauté juive internationale ?
Eliahou : C’est un espoir, un lien qui traverse les siècles et les frontières. Pour beaucoup de Juifs dans le monde, savoir que des prières sont dites sur la tombe d’Esther et de Morde’haï leur donne de la force. Ils se sentent connectés à leur histoire, à leur peuple. J’ai reçu des messages bouleversants de personnes qui ont vu des miracles après que leurs noms aient été mentionnés. Ce n’est pas moi qui fais quelque chose, ce sont les mérites de Morde’haï et Esther qui continuent d’agir.
Question: Un dernier mot pour ceux qui souhaiteraient participer ?
Eliahou : Ceux qui souhaitent que leur nom soit inclus dans ces prières peuvent contacter le VaadHarabanim. Ce que je peux vous assurer, c’est que lorsque je prononce un nom devant ces tombes sacrées, c’est avec ferveur et sincérité. Que le mérite de Morde’haï et Esther soit une source de bénédiction et de protection pour tout le peuple juif.