Yehouda et Chira étaient un couple heureux, et formaient avec leurs six enfants une famille « modèle ». Yehouda étudiait le matin et travaillait l’après-midi. Quant à Chira, elle travaillait à mi-temps. Leurs enfants étaient tous scolarisés et l’aîné, Chlomi, âgé de 14 ans, faisait la fierté de ses parents, grâce à son sérieux et ses ambitions spirituelles. Un jour, en revenant du travail, Chira se plaignit de maux de tête. Malheureusement, après de nombreux examens, il s’avéra qu’il s’agissait d’une tumeur au cerveau. Chira décéda deux mois plus tard. Du jour au lendemain, Yehouda se retrouva seul avec ses six enfants.
Après les sept jours de deuil, il fit une triste constatation : si D.ieu lui donnait les forces de continuer, il ne pourrait pas, malgré toute sa bonne volonté, assumer le rôle de père et de mère.
Un jour, un certain Aharon prit contact avec lui. Ce bénévole du Vaad Harabanim lui proposa de l’aide afin de réorganiser sa vie au quotidien : il contacta une baby-sitter pour garder les enfants ainsi qu’une femme de ménage. Yehouda avait de nombreux problèmes à surmonter et cet ange gardien providentiel le sortit bien des fois de l’embarras. La vie semblait reprendre son cours normal.
Mais un soir, quelques mois plus tard, ce fut le choc. Le conseiller d’éducation de l’école de son fils Chlomi, frappa à la porte.
– Chlomi s’est disputé avec l’un de ses camarades et lui a cassé le bras. Je suis vraiment désolé mais les règles de notre école sont très strictes, et c’est une limite à ne pas dépasser. Je suis sincèrement désolé, mais nous ne pouvons garder votre fils dans notre établissement pour l’instant…
Yehouda tombait de haut : Chlomi faisait l’admiration générale. Tout le monde aurait voulu avoir un fils comme lui : perspicace, intelligent, assidu, serviable, poli et attentionné… Comment était-ce possible ?
Yehouda ne s’était aperçu de rien mais, en réalité, après le décès de sa mère, Chlomi avait eu un choc plus grand que tous les autres enfants. Il n’exprimait rien de ses sentiments mais était pourtant très déstabilisé, ce qui se faisait ressentir sur ses études et son comportement général… Jusqu’à cette dispute qui avait entraîné son renvoi de l’école.
Lui qui était l’un des meilleurs élèves de sa classe ! C’était la force de caractère de Chlomi qui l’avait en vérité desservi : tout le monde avait cru qu’il s’en sortirait, qu’il surmonterait cette épreuve.
Après une courte discussion avec son fils, Yehouda se rendit compte que celui-ci n’était pas d’accord de retourner à l’école. Il avait été le meilleur élève de la classe et il était maintenant renvoyé… Il ne pouvait supporter d’avoir ainsi perdu sa réputation et il mourrait de honte de retourner à l’école.
Désemparé, Yehouda appela Aharon pour lui demander conseil. Que faire en pareil cas ? Après une longue discussion et avoir envisagé plusieurs solutions, ils décidèrent d’envoyer Chlomi chez le frère de Yehouda qui possédait une imprimerie à Haïfa. Bien sûr, c’était un pis-aller. Mais il valait mieux que Chlomi soit occupé pendant les mois de vacances plutôt que de continuer à broyer du noir, seul à la maison. Pendant ce temps, Yehouda chercherait un nouvel établissement pour son fils.
Or, juste avant Chavouoth, alors que Chlomi était déjà à Haïfa, Yehouda découvrit dans sa boîte aux lettres un prospectus du Vaad Harabanim. Il s’engagea à donner une certaine somme en faveur de son fils pour Roch ‘hodech Sivan afin de bénéficier de la tefila du Chlah. Il pria de tout son cœur que son fils retrouve le goût de l’étude.
Or, il était prévu que Chlomi passe la fête à ‘Haïfa. Et c’est là que le prodige eut lieu.
Pendant la nuit, comme tout le monde pour la veillée d’étude, Chlomi se rendit à la synagogue. En voyant les jeunes hommes absorbés dans l’étude, une pointe de nostalgie traversa son cœur :
– L’année dernière, pensa t-il, j’étais aussi en train d’étudier comme ses ba’hourim…
Il était minuit. Chlomi sortit pour la énième fois, le cœur gros. Dehors, absorbé dans ses pensées, il ne vit pas l’homme qui se dirigeait en sens inverse et faillit le percuter. Il s’excusa et l’homme, voyant que Chlomi semblait perturbé, lui posa plusieurs questions. Ils commencèrent à lier connaissance. Après les politesses d’usage, ils entamèrent une réelle discussion. L’homme était très affable et chaleureux. Chlomi se livra à lui, lui confiant son histoire et ses problèmes de conscience. Compréhensif, l’homme l’écouta avec attention. Perspicace, il avait senti que Chlomi était un très bon garçon, une véritable perle, qui traversait une passe difficile à cause de la disparition de sa mère.
– Tu es un bon garçon et je vais te révéler un secret : sache que je suis en mesure de t’aider. Un très bon ami à moi est le Rav Y.
– Mais c’est le Roch Yechiva de la Yechiva de B., la meilleure du pays ? s’exclama Chlomi qui n’en revenait pas.
– C’est exact et je dois m’y rendre demain, poursuivit l’homme. Je te promets que j’interviendrais en ta faveur pour que tu puisses y être accepté. Ce sera pour toi une nouvelle chance… Tu verras, tu réussiras !
Chlomi était touché au plus profond de son cœur. Grâce à la promesse de l’homme, il put entrer à la Yechiva et reprendre une vie normale. Les prières d’un père, associées à la tsedaka, sont capables de véritables miracles…