M. G. a un cœur en or. C’est un homme actif dans le monde du ‘hessed. Il aide les nécessiteux de son quartier, prête de l’argent à ceux qui en ont besoin, aide les jeunes couples à trouver des appartements et à se meubler. Il est à l’écoute de tous et entretient des contacts qui lui permettent de rendre de grands services à de très nombreuses personnes.
Le jour de Pourim, pour M. G. et sa famille, suit un rituel invariable. Avant de rejoindre sa femme au festin qui a lieu chez ses beaux-parents, M. G. règle de nombreuses affaires de ‘hessed et de tsedaka. N’est-ce pas un jour particulièrement indiqué pour s’occuper de la communauté et de ses besoins ? Vers 14 h, M. G. quitte son domicile pour se rendre chez ses beaux parents où l’attendent son épouse et ses enfants.
Ce jour-là, il descendit de chez lui en retard. Par chance, il trouva immédiatement un taxi. Le chauffeur, un jeune homme d’une trentaine d’années, commença à discuter avec lui et lui fit part de ses petits soucis financiers. M. G. fit preuve, comme à son habitude, d’une grande compréhension et l’écouta patiemment tout en lui prodiguant de judicieux conseils. Pin’has, le chauffeur, se confia et, constatant l’amabilité de son interlocuteur, lui fit une demande inédite. « Monsieur », lui dit-il, « Je me permets de vous demander quelque chose d’un peu particulier. Nous ne nous connaissons pas mais je sens beaucoup de bonté en vous. C’est pourquoi, je vous demande un grand service. Pourriez-vous me prêter 150 dollars jusqu’à demain ?
Pin’has avait l’air d’être un garçon sérieux. Comme il l’avait expliqué à M. G., il travaillait depuis presque dix ans et n’avait que rarement été en découvert à la banque. Mais il avait eu quelques petits déboires pécuniaires, qui l’avaient poussé à lui demander cette somme.
« Je vous promets que je vous les rends demain », ajouta t-il, lorsqu’il vit, en regardant dans son rétroviseur, le visage hésitant de M. G.
Ce dernier était tiraillé : d’un côté, il avait envie de rendre service à ce jeune homme. C’était Pourim, un jour particulièrement propice aux actes de ‘hessed. Mais d’un autre côté, il ne connaissait pas Pin’has et n’avait aucune certitude quant à son honnêteté.
Après quelques secondes de réflexion, M. G. sortit son portefeuille. Il était heureux de pouvoir accomplir cette mitsva. Et puis, finalement, ce n’était pas une très grosse somme. Pin’has semblait en avoir véritablement besoin et l’avait assuré que ce n’était que pour un seul jour. Le trajet prit bientôt fin et Pin’has tendit une main cordiale à son bienfaiteur qui descendit de la voiture de la meilleure humeur qui soit.
Le lendemain matin, à 8h30, M. G. reçu un coup de fil de Pin’has. « Je pensais pouvoir récupérer les 150 dollars aujourd’hui mais en fait, ce ne sera que demain. Je suis vraiment désolé ».
M. G. ne réagit pas à cette nouvelle et accepta sans sourciller. Un jour de plus ou de moins ne faisait pas vraiment de différence.
Mais le lendemain, à la même heure, le même coup de fil se réitéra. M. G. se sentit vaguement mal à l’aise. Il ne pouvait rien faire de toute façon et devait prendre patience. « La mitsva n’en sera que plus grande », pensa-t-il.
Le troisième jour, par contre, M. G. ne reçut pas de coup de fil. Après une semaine, il décida d’appeler Pin’has. Pas de réponse. Il essaya des dizaines de fois au cours des jours qui suivirent. Rien. M. G. se sentit floué. Il reconnaissait avoir été un peu négligent : il n’avait pas noté le nom de famille de Pin’has, l’avait oublié et n’avait aucun moyen de le retrouver. Il ne lui restait que le sentiment amer de sentir sa confiance abusée. Il lui semblait que Pin’has avait profité de sa gentillesse.
Des mois passèrent. Le jour de Pourim, comme à son habitude, M. G. fit le trajet en taxi afin de rejoindre sa famille pour le festin. Il ne put s’empêcher de repenser à Pin’has et à son aventure de l’année passée.
Encore un an plus tard, il descendit de chez lui d’un pas alerte. Il était très en retard car il avait aidé un jeune ‘hatan à réunir la somme nécessaire à son mariage.
Juste en bas de chez lui, il aperçut une affiche du Vaad Harabanim. Une idée bizarre traversa son esprit et il se dit : « Si je retrouve les 150 dollars que j’ai prêtés il y a deux ans au chauffeur de taxi, je promets de les donner au Vaad Harabanim. » Il avait conscience de l’absurdité de cette promesse. En effet, il n’y avait aucune chance qu’il retrouve cette somme.
Il attendit plusieurs minutes devant chez lui. Le son des klaxons mêlés aux musiques de Pourim rendait la rue particulièrement joyeuse. Des enfants, déguisés en clown, en Cohen Gadol, en princesse ou en policier, riaient et couraient, ivres de bonheur. M. G. était heureux. Il avait pu aider un jeune ‘hatan et profitait de l’ambiance « pourimesque » qui régnait.
Il héla enfin un taxi et s’engouffra à l’intérieur. Comme l’année précédente, il ne put s’empêcher de repenser à sa mésaventure. Il en fit même part au chauffeur en maugréant contre sa malchance.
Ce dernier se retourna soudainement, et regarda en face M. G. Il s’arrêta alors sur le bord de la route afin de lui demander : « Quoi, c’est vous qui m’avait prêté 150 dollars il y a deux ans ? Depuis, je n’ai eu de cesse de vous chercher. J’ai refait plusieurs fois le trajet dans l’espoir de vous apercevoir mais en vain. Je ne savais pas comment faire pour vous retrouver. » M. G. était époustouflé. « Comment ça ? C’est moi qui vous ai cherché ! J’ai inlassablement appelé sur votre portable sans recevoir de réponse. J’ai laissé des dizaines de messages et vous ne m’avez jamais rappelé. » « Je vous comprends, répondit Pin’has. Mais je n’y suis pour rien. Trois jours après vous avoir emprunté l’argent, on m’a volé mon téléphone. J’y avais inscrit votre numéro et je n’avais aucune autre trace de vous. Je n’avais donc aucun moyen de vous joindre ! Je suis vraiment confus de cet incident imprévisible. Voici les 150 dollars ! » Pin’has lui tendit la somme avec un grand sourire et s’excusa encore pour ce regrettable contretemps.
M. G. lui expliqua qu’il allait immédiatement reverser cette somme au Vaad Harabanim, conformément à la promesse qu’il avait faite. Grâce au Vaad Harabanim, j’ai été témoin d’un véritable miracle et j’ai appris une leçon pour la vie : il faut toujours juger son prochain positivement, le « caf ze’houth